Manger pour la planète
N’guessan Deborah
| 05-09-2025

· Équipe alimentaire
Quand nous pensons à réduire notre impact environnemental, nous nous concentrons souvent sur des sujets comme les transports ou la consommation d’électricité. Mais avez-vous déjà réfléchi au coût écologique de ce que vous mangez ?
Le terme « empreinte carbone » désigne la quantité totale de gaz à effet de serre (comme le dioxyde de carbone ou le méthane) libérée dans l’atmosphère à cause des activités humaines. Et oui — cela inclut la production, la transformation, l’emballage et le transport des aliments.
Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), les systèmes alimentaires sont responsables de 21 à 37 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Cela signifie que notre manière de cultiver, de consommer et de jeter la nourriture a un impact énorme sur l’environnement. La bonne nouvelle ? Nous pouvons agir chaque jour, simplement en changeant nos habitudes alimentaires.
De la ferme à l’assiette : d’où viennent les émissions ?
L’empreinte carbone d’un seul repas varie énormément selon les ingrédients. La production d’aliments d’origine animale, surtout la viande rouge et les produits laitiers, génère bien plus d’émissions que les aliments végétaux.
Plusieurs raisons à cela : la digestion des animaux libère du méthane, leur élevage demande d’énormes quantités de nourriture et d’eau, et le défrichement des terres pour le pâturage entraîne la déforestation.
Même les aliments végétaux ont un coût en émissions — liées aux engrais, à l’irrigation, au transport ou à l’emballage. Mais leur impact global reste moindre, surtout s’ils sont cultivés localement et en saison.
Voici un aperçu des principaux postes d’émissions dans la production alimentaire :
• Agriculture (engrais, eau, élevage) : principal contributeur
• Changements d’affectation des sols (comme la déforestation) : fort impact pour la viande et le soja
• Transport : particulièrement pour les produits acheminés par avion, comme les baies ou les asperges
• Emballage et transformation : surtout pour les aliments ultra-transformés ou surgelés
• Gaspillage : la nourriture jetée produit du méthane dans les décharges
Quels aliments ont la plus forte empreinte carbone ?
Savoir quels aliments polluent le plus permet de faire des choix plus malins. Selon les données de l’Environmental Working Group (EWG) et de Our World in Data, voici quelques exemples :
• Viande : environ 60 kg de CO₂-équivalent par kilo
• Fromage : environ 21 kg de CO₂e par kilo
• Agneau : environ 24 kg de CO₂e par kilo
• Volaille : environ 6 kg de CO₂e par kilo
• Tofu : seulement 2 à 3 kg de CO₂e par kilo
• Lentilles : moins de 1 kg de CO₂e par kilo
• Légumes-racines et céréales : parmi les plus faibles émetteurs
En résumé, remplacer même un ou deux repas par semaine à base de viande rouge par des légumineuses ou des céréales peut réduire significativement votre empreinte carbone personnelle.
Le gaspillage alimentaire : les émissions cachées
On l’oublie facilement, mais le gaspillage alimentaire est l’un des plus grands responsables des émissions liées à l’alimentation. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), près d’un tiers de la nourriture produite dans le monde n’est jamais consommé.
Quand les aliments pourrissent dans les décharges, ils libèrent du méthane — un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le dioxyde de carbone sur une période de 100 ans.
Réduire le gaspillage, c’est non seulement économiser de l’argent, mais aussi diminuer directement son impact environnemental. Des gestes simples comme planifier ses repas, bien conserver ses aliments, congeler les restes ou utiliser les fruits et légumes « imparfaits » peuvent faire une grande différence.
Local et de saison : pourquoi c’est important
Manger des produits locaux et de saison réduit le besoin de transport longue distance et de conservateurs artificiels. Moins un aliment voyage, moins il consomme de carburant et d’emballages. En plus, les aliments de saison sont souvent plus frais, plus savoureux et moins chers.
Attention toutefois : le transport représente une part relativement faible des émissions totales par rapport à la production. En revanche, le transport aérien génère beaucoup plus d’émissions que le fret maritime ou routier. À éviter donc quand c’est possible.
La cuisson influence aussi votre empreinte
Même votre façon de cuisiner a un impact. Utiliser des appareils économes en énergie — comme les autocuiseurs ou les plaques à induction — réduit la consommation d’électricité ou de gaz. Éviter de préchauffer inutilement, cuisiner par lots ou couvrir les casseroles pour accélérer la cuisson, tout cela diminue la consommation énergétique de votre cuisine.
Selon le département de l’Énergie des États-Unis, utiliser un micro-ondes ou un autocuiseur au lieu d’un four classique peut réduire la consommation d’énergie jusqu’à 80 % pour certains plats.
Des choix plus durables, à portée de main
Réduire l’empreinte carbone de votre assiette ne signifie pas renoncer à tous vos plats préférés. Il s’agit de trouver un équilibre et d’opérer des changements simples mais efficaces. Voici quelques gestes à fort impact :
• Essayez le « sans viande le lundi » : remplacer un seul repas carné par semaine par un repas végétarien réduit fortement vos émissions annuelles.
• Privilégiez les aliments entiers : les fruits, céréales et légumineuses non transformés nécessitent moins de ressources que leurs versions ultra-transformées.
• Achetez en vrac : réduit les emballages et l’énergie liée au transport.
• Choisissez bio quand c’est possible : l’agriculture biologique utilise souvent moins d’engrais de synthèse et favorise des sols plus sains, même si son empreinte carbone n’est pas toujours inférieure.
• Soutenez les producteurs locaux : les marchés de producteurs ou les AMAP réduisent les émissions de transport et dynamisent l’économie locale.
Étiquettes carbone et outils d’aide
Certains fabricants et épiceries commencent à ajouter des étiquettes indiquant l’empreinte carbone de leurs produits, pour aider les consommateurs à mieux choisir. Ce n’est pas encore généralisé, mais cette tendance gagne du terrain à mesure que les consciences évoluent.
Des outils en ligne et des calculateurs permettent aussi d’estimer l’empreinte carbone de vos repas. Ceux du WWF, de la BBC ou du Carbon Trust vous permettent d’entrer vos ingrédients pour avoir une estimation claire de l’impact de votre assiette.
Santé et environnement : un double bénéfice
Fait intéressant : les aliments à faible empreinte carbone s’alignent souvent sur une alimentation saine. Les régimes riches en céréales complètes, légumineuses, fruits et légumes profitent à la fois à votre santé et à celle de la planète.
Une étude publiée en 2019 dans The Lancet a introduit le concept de « diète pour la santé de la planète », visant à répondre aux besoins nutritionnels tout en respectant les limites environnementales.
Cela confirme une idée simple : en adoptant de petits changements — manger plus végétal, réduire les ultra-transformés, éviter le gaspillage — on aide la Terre… et on se porte mieux soi-même.
Votre assiette, votre pouvoir
Les choix alimentaires que nous faisons chaque jour ont un pouvoir bien plus grand qu’on ne le croit. Si le changement climatique semble être un problème trop vaste pour être résolu individuellement, nos habitudes quotidiennes comptent vraiment.
Ce que nous mettons dans notre assiette s’additionne — à l’échelle de milliards de personnes, chaque repas peut faire partie de la solution.